L’Université de Limoges a un partenariat unique et stratégique avec l’Université des Mascareignes à Maurice. Une université à laquelle elle apporte un appui au niveau de la gouvernance, de la pédagogie et de la recherche. Dinesh Somanah, Directeur Général depuis 2016, et Nathalie Bernardie Tahir, Présidente du Conseil d’Administration de l’Université des Mascareignes depuis novembre 2017, nous parlent de ce modèle original de collaboration.

Comment le partenariat s’est-il construit ?

NBT : Il date de 1998. Il s’agissait d’un partenariat conduit par Gilles Broussaud, alors Directeur de notre IUT, et l’IST (Institut Supérieur de Technologie), fondé sur la création de doubles diplômes de DUT. Cette collaboration a si bien fonctionné pendant une quinzaine d’années que l’opportunité de passer à la vitesse supérieure s’est présentée en créant une université. C’est Pierre Guillon, enseignant-chercheur de notre université, qui a dirigé l’Université des Mascareignes à sa création.

DS : Pour atteindre la masse critique nécessaire à cette création, l’IST (francophone) a fusionné avec un autre institut d’économie-gestion et management (anglophone) ce qui a donné naissance à l’Université des Mascareignes en 2012. Une des particularités de l’Université Des Mascareignes est que la moitié des cours est en français et l’autre en anglais, ce qui attire non seulement les étudiants mauriciens, mais aussi ceux d’Afrique francophone qui deviennent bilingues à la fin de leurs études. Quelques-unes des autres particularités sont que l’Université Des Mascareignes est la seule université publique francophone à Maurice et parmi les meilleures en termes d’employabilité.

En quoi consiste le partenariat ?

NBT : L’Université de Limoges a été choisie pour accompagner l’Université des Mascareignes dans la mise en place de sa gouvernance, sa pédagogie et sa recherche suivant le système européen LMD. Un accord cadre en 2013 et une convention d’association en 2014 ont été signés entre les deux établissements.

La convention d’association s’articule autour de quatre axes forts :

• Mise en œuvre de l’offre de formation (27 doubles diplômes)
• Mise en œuvre de la Recherche et de l’Innovation
• Mobilité internationale
• Appui à la gouvernance

C’est un partenariat unique sur la scène universitaire française, car c’est l’Université de Limoges qui porte la création et l’animation de l’Université des Mascareignes. La collaboration est à ce point étroite que le DG ou le Président du conseil d’administration est un personnel de l’Université de Limoges.
DS : au niveau pédagogique, les maquettes des diplômes ont été co-construites avec des enseignant.e.s de l’Université de Limoges qui se prononcent également sur les sujets d’examen, font partie des jurys et apportent des conseils.

Comment vous partagez-vous la gouvernance de l’Université Des Mascareignes ?

DS : En théorie le président et les autres membres du conseil d’administration déterminent la politique de l’Université Des Mascareignes et le Directeur général s’assure que celle-ci est mise en œuvre. Mais Nathalie et moi avons décidé de travailler ensemble sur le plan politique et opérationnel
NBT : Je ne peux pas imaginer de concevoir une stratégie sans savoir comment cela se passe concrètement sur le terrain. Je serai présente 4 à 5 fois dans l’année, du moins au départ. Les conseils d’administration ayant lieu tous les mois, j’en présiderai une partie en visioconférence.

Quels sont les projets ?

NBT : pour l’instant, il y a quatre chantiers majeurs :
Faire en sorte que les 27 DU qui sont délivrés actuellement deviennent des licences qui permettent aux étudiant.e.s de Maurice de poursuivre en master s’ils le souhaitent.
Ouvrir un master en septembre 2018. Il sera co-porté avec l’Université de La Réunion et aura pour thématique le développement durable, les énergies renouvelables et systèmes industriels. C’est un secteur en forte demande à Maurice.
Restructurer l’Ecole Doctorale créée il y a 3 ans, mais qui reste encore fragile, afin de permettre aux enseignant.e.s de l’Université des Mascareignes de passer une thèse et de monter en compétences, et aux étudiant.e.s de poursuivre en doctorat.
Créer les conditions d’une ouverture internationale de l’Université des Mascareignes en multipliant les projets de formation ou de recherche en partenariat international.
DS : au niveau administratif, nous allons créer un département des finances, un département d’achat, et un département des ressources humaines. Par ailleurs, nous allons développer l’informatisation de nos systèmes.

Quels sont les enjeux pour l’Université de Limoges ?

NBT : Je crois beaucoup à une forme d’«internationale universitaire ». Toutes les universités du monde sont engagées dans une même démarche : former de plus en plus d’étudiant.e.s afin de leur permettre de réaliser leurs projets professionnels et de développer leur citoyenneté. Ce partenariat est donc pour l’Université de Limoges une manière d’aider l’Université des Mascareignes dans ses missions de formation et de recherche, mais aussi de rayonner dans la région du sud-ouest de l’océan Indien en créant des partenariats avec La Réunion, Madagascar, Les Comores. Et c’est là une occasion exceptionnelle pour notre université de jouer un rôle majeur dans l’animation de la francophonie universitaire, porteuse de formidables enjeux. Mais nous avons aussi beaucoup à apprendre des pays du sud et de Maurice en particulier, notamment en matière de numérique et d’innovation pédagogique, ce qui nous invite à envisager différemment les rapports nord-sud dans les partenariats universitaires.

Et pour l’Université Des Mascareignes ?

DS : L’Université Des Mascareignes a des spécificités par rapport aux autres établissements d’enseignement supérieur de Maurice : le bilinguisme, la double diplomation, le rapport étroit avec le tissu économique. Nous développons des formations et une recherche en adéquation avec les besoins de notre territoire. Nous sommes numéro un en termes d’insertion professionnelle à Maurice. Le gouvernement mauricien pense que le modèle développé à l’Université Des Mascareignes est nécessaire pour le pays. Par ailleurs, ce lien avec Limoges nous permet d’atteindre un standing international, conforté par le soutien total de l’AUF (Agence Universitaire de la Francophonie) et de l’ambassade de France à Maurice.